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51 jours
30 min
Québec, 2020

Production : Miryam Charles
Français
Anglais

Histoire



Résumé


Un historien au don de voyance erre dans les rues de l’ancienne Ville-Lumière. Il entrevoit, dans les chutes de Shawinigan, une méditation sur l’Histoire humaine en perte de sens.

L'avis de Tënk


Surgissant vive, comme seule une source sourd, la voix pénétrante de Christian Morissonneau (1939-2019) brise la nuit et nous rappelle le pouvoir du verbe dans le récit de notre Histoire. Car, dit-il, les mots sont le moteur de sa transmission, aujourd’hui en panne, et il faut à tout prix les clamer et les réclamer pour que l’Histoire nourricière puisse encore ensemencer notre imaginaire. 

Ainsi, porté par la splendeur extatique de l’ouverture de Lohengrin de Wagner, l’historien poète inscrit la genèse de son récit, à la façon d’un Hésiode contemporain, dans le chaos primordial pour arriver au combat prométhéen des ingénieurs shawiniganais, qui ont « volé le feu à l’eau » afin de donner aux cultivateurs indigents des campagnes mauriciennes la lueur d’un espoir électrique. Et c’est le début fabuleux et pétulant d’un capitalisme industriel « inquestionnable » qui, trop rapidement, sera funestement asphyxié par son impitoyable successeur, le capitalisme financier. En témoignent avec tristesse les ruines de la jadis glorieuse papetière Belgo, arpentées par le double de Morissonneau. 

Tissé avec minutie, le fil(m) d’Ariane Bilodeau suit les traces de celui qu’elle chérit comme son frère d’esprit et compagnon de la nuit, le peintre romantique allemand Caspar David Friedrich (Le voyageur contemplant une mer de nuages), pour nous révéler la tragédie du paysage. Alors que des bruines mystiques hantent la ville dépeuplée, exsangue de ses rêves, lumières et ombres se fondent torrentueusement et poudroient dans le grain des sels d’argent. La nature, irrésistible, affirme son empire sur la vaine humanité.

Puis, au moment où, en une élégie languide, les cors et les bassons de la Pavane pour une infante défunte de Ravel font écho aux sifflets des trains, une main s’ouvre sur le vide, à la fois métaphore de l’insaisissable rapport que nous entretenons au monde, à la fois appel à la sensualité, à la curiosité et à la liberté.

Les surimpressions visuelles et sonores, comme les vapeurs fantômes qui enveloppent le drame de la ville, conjuguent avec brio le passé au futur, la présence à l’absence.

 

 

Richard Brouillette
Cinéaste, producteur, éleveur de poules et comptable

 

 

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